Le désaccord ne me semble pas très poussé.
En effet tu as raison de le rappeler, la direction prise par la Saison 7 tient pour grande part à l'annulation des plans initiaux. Je n'ai pas la prétention ni l'envie de dire que tout s'explique par un désir d'attirer le chaland par des méthodes racoleuses dans la Saison 7, ce serait mensonger. Il existe cette récurrence, impliquant que toutes les séries story-drivées ou presque qui ne savent plus quoi raconter, se retournent vers leurs personnages pour meubler. C'est arrivé à CSI, le formula-show type, qui dès la Saison 4 n'était plus foutu de narrer une seule enquête et s'est donc lancé dans l'évocation du ressenti de ses personnages inintéressants. La Saison 7 de X-Files, sur le plan mythologique mais même dans plusieurs loners, c'est un peu la même chose... en pire, car l'on y examine les personnages uniquement sous l'angle thématique du rapport amoureux. "All Things" est symptomatique, un épisode sur le papier consacré au passé de Scully, en réalité uniquement sur son passé amoureux et comment elle va s'en défaire pour retrouver Mulder, son seul présent possible. "En Ami" est un prétexte pour tester la fidélité de Scully envers Mulder - un épisode co-écrit par Spotnitz et aliénant au possible, où le CSM s'emporte dans des litanies indignes du personnage et flirtant avec la trahison totale de sa caractérisation façon "Il vous est indispensable mais vous avez peur de tomber amoureuse de lui". Comment ne pas voir en la décision d'avoir tué Samantha l'unique moyen de ne pas contrarier le tournant pris par la MSR ? Cette issue était encore inconcevable deux ans plus tôt. Diana Fowley est éliminée, jetée comme une merde hors-camera, pour ne pas gêner les tourtereaux. "Requiem" ne dispose d'aucun scenario, il repose entièrement sur un effet de contraste "Mulder et Scully ensemble" à grands renforts de séquences tactiles puis "Mulder et Scully séparés". A ce niveau, même "NIHT" est plus dense. En fait "Amor Fati" est le seul épisode à aborder les personnages sous un angle plus riche que la seule romance, bien qu'elle y soit proéminente, la faute à Duchovny qui à mon avis au fil des ans est devenu meilleur psychologue de son personnage que Carter et Spotnitz réunis. Est-ce que tout découle d'une velleité d'imposer le shipperisme sans doute pas, le manque d'inspiration aussi a poussé en ce sens, mais le résultat est ce qu'il est : la mythologie qui commence à s'aligner sur les nécessités du shipperisme et non l'inverse
Concernant la Saison 8, j'admets suite à ton post que l'épisode "Three Words" - qui s'ajoute donc à "Vienen" - essaie effectivement de renouer un peu avec une définition large de la Conspiration, dont la famille Scully ne serait pas l'unique épicentre. A tel point d'ailleurs qu'il est une caricature des grands moments de "Memento Mori", et que son écriture un peu faiblarde est avant tout compensée par ses ficelles old-school que l'on n'avait plus vues depuis la Saison 5 - intrusion dans les bases de données, Rohrer l'informateur dangereux, irruption des militaires etc... mais c'est un cas unique dans les trois dernières saisons - une tentative naît dans "NIHT" mais tombe à plat car ce n'est plus la priorité de Carter et Spotnitz. Hormis dans cet épisode, la mythologie est passée de la question "Que font-ils ?" à "Que me veulent-ils ?", or les premières saisons mêlaient les deux, avec même un léger intérêt d'avance pour la première. C'est la même erreur que dans MillenniuM Saison 3, où les actions du Groupe ne sont plus montrées que par le prisme de Frank, qui les condamne donc sans surprise en bloc. Résultat, on sait factuellement que tout n'est pas si simple, que tenter de récupérer Frank et être méchant n'est pas le seul objectif du Groupe, mais la série ne montre que ça et perd toute sa richesse. Sur la fin la mythologie de X-Files mine de rien n'est pas si éloignée de l'écueil qu'a connu MillenniuM Saison 3 en refusant de définir le Groupe mais en faisant de Frank l'unique dénominateur commun de toutes ses manigances... et encore MillenniuM a la chance de s'en tirer plus facilement car sa ligne directrice est inexistante et ses scenari à la "Bardo Thodol" juste incompréhensibles. Restent "Within/Without", le certes pas si mal "Per Manum", "TINH/DeadAlive" - avec des storylines consternantes comme l'ultimatum de Krycek "Tuez le bébé de Scully ou bien je vais tuer Mulder" pseudo-intégrées à la mythologie par la suite et emblêmatiques de la fusion mythologie/shipperisme - et bien évidemment "Essence/Existence", qui a le mérite d'être bien rythmé, mais qui n'est rien de plus qu'une opération survie que tous les personnages de la série, tous identiques les uns aux autres, montent pour protéger l'union Mulder-Scully. Etait-ce inévitable à partir du moment où Carter et Spotnitz ont dû opter pour l'enlèvement de Mulder par les aliens ? Oui et non. Oui parce qu'il est évident que les personnages ne pouvaient pas faire semblant en ignorant la disparition de Mulder, non parce qu'il y avait moyen d'inventer de nouvelles histoires au lieu de choisir la solution de facilité en confondant mythologie et vie conjugale. William n'avait pas besoin d'être désigné comme leader des Super-Soldats, élément clef de la colonisation et tutti quanti... il ne l'a été que pour pouvoir squatter l'antenne officiellement avec l'amourette des deux héros. La Saison 9 est la plus criante là-dessus mais tout se construit durant la Saison 8, quant à la septième année elle ne met pas directement le procédé en oeuvre mais porte déjà les fondements "philosophiques" de cette bifurcation. En un sens, il y a au moins une logique évolutive des Saisons 7, 8 et 9.
Enfin, c'est tout à l'honneur de ceux-là que d'éviter les formules misogynes, mais je n'arrive pas à me projeter à un niveau d'oubli tel qu'il me ferait zapper les 80% des shippers féminines qui nous emmerdent depuis dix ans avec leurs avatars nazes, leurs déclarations nazes, leurs photos de Gillian Anderson nazes, leurs connivences avec tous les topics nazes, et la médiocrité qu'elles ont instillé dans la série par leur forcing et leurs encouragements répétés envers Carter et Spotnitz, qui aujourd'hui peuvent donc avancer sans scrupules l'idée selon laquelle le vrai sujet de la série était l'idylle naissante de Mulder et Scully - au passage comme idylle on rarement vu plus mal écrit. Mon amour inconditionnel et charnel pour les filles/femmes noromos n'en est que plus ardent et passionné.
[quote]Pour le coup, la simple lecture des commentaires sur l'article de xfilesnews sur les vidéos est éloquent : les shippers sont ultra en colère et détestent ces vidéos.[/quote]
Les shippers sont des chochottes et ont tiré la gueule à chaque fois que Mulder et Scully se sont dit "Zut !" ou "Flûte !" mutuellement durant la série, leurs réactions sont ineptes et disproportionnées quel que soit le sujet. Il y en a qui ont fait la tronche six mois parce que dans le serie finale Mulder et Scully ne se sont pas mariés, on ne peut pas les prendre au sérieux à ce degré de déni de ce qu'est X-Files.
[quote]Donc non seulement Carter et Spotnitz ne se vendent pas, mais ils poursuivent leur vision avec le même risque qu'à la fin de la série : mécontenter tout le monde.[/quote]
Je ne sais pas.
Ils ont pris le soin de dévoiler les extraits shippers dans la bande-annonce qui s'est rapidement retrouvée sur le net, de médiatiser la fameuse photo tirée de Santa Barbara, et de faire moultes déclarations sur la MSL, comme dirait Zerosum, ce bien avant de poster ces deux videos pourtant prêtes à l'avance. Ces deux videos auraient précédé tout le reste, ce n'était déjà plus la même tactique. Ils savent que les shippers ont déjà intégré que le bilan du film serait largement en leur faveur, ils savent également que c'est sa note finale que l'on retiendra, une note qui s'annonce sentimentale ou rien. Le film en lui-même parlera davantage que nos spéculations, mais en l'état je ne vois pas spécialement de prise de risque.
Quant à savoir ce qui serait le mieux, je ne suis pas sûr non plus. Si avoir séparé Mulder et Scully permet de ne pas s'apesantir sur leurs pleurnicheries en dehors des dix dernières minutes, tant mieux. Si au contraire ça plombe le film de regards de chiens battus et de trente amorces de réconciliations dont seule la dernière sera concluante, ce sera négatif. Seul le traitement comptera.
Mais je reconnais volontiers que oui, la télévision américaine, particulièrement depuis 2003 - 2002 étant la dernière année de grande fécondité créative - est bien en deça des standards de X-Files, y compris des Saisons 8 et 9. Parce que mythologie foireuse ou non, demeurent les loners qui n'ont pas à rougir face à ce qui est diffusé de nos jours, et font bonne figure confrontés à toutes les futures daubes annoncées aux upfront 2008