[quote]Tout à fait et tu vois c'est ça que j'appelle une fiction TV française réussie [/quote]
Certes, mais pas plus réussie que celles que je défends, en ce qui me concerne... :P
De toute façon je ne les mets pas en concurrence: elle et les autres peuvent coexister sans problème.
[quote]Et j'ai l'impression que je suis le seul à kiffer les filtres bleus[/quote]
J'ai une petite interprétation à apporter.
Pour moi les filtres bleus sont vraiment trop appuyés, et j'ai du mal à accrocher certains éclairages.
Mais je n'en veux absolument pas au réalisateur, et je le soutiens même dans sa démarche, si je peux dire.
Il est évident qu'il s'est inspiré du film "Traffic" de Steven Soderbergh, dont on se souvient que les parties "Amériques du Nord" étaient filmées en bleu et blanc, et les parties "amérique Centrale" avec une surexposition entre jaune et blanc aveuglante.
L'idée est ici la même: la France est filmée en bleu et le Pakistan avec des filtres jaunes. Je ne suis pas sûr de l'à propos de cet esthétique pourtant très séduisante. Le bleu semble marquer aussi la dépression contagieuse d'Anne Brochet, dont l'histoire "d'amour" avec Léon est traitée subtilement.
Mais je considère que le simple fait de s'inspirer du petit génie soderberghien exprime une réelle envie de réalisation, une appropriation gonflée, qui a les qualités de ces défauts dans le cas présent. C'est une inspiration très difficile à manier.
[quote]Bref Bravo Mr Krivine !!! [/quote]
J'ai quand même un bémol à rajouter. La prise de risque scénaristique bute toujours sur un problème de l'identification du héros maghrébin dans les fictions françaises, et ça, ça commence à m'énerver.
Soit on a le noir ou l'arabe de service, soit on a du mal à donner à un maghébin un rôle qui corresponde à autre chose que ce qui le rapproche de son origine. A quand un maghrébin ou un noir ingénieur au CNRS, député, ou encore (car ça ne se limite pas à une "discrimination positive télévisuelle") jouant un vrai salopard de mafioso sans les clichés pourris de la banlieue.
Dans le cas de "Code: DP", a priori la question ne se pose pas. Puisque le propos porte sur le terrorisme intégriste islamiste, il est évident que le seul à pouvoir infiltrer un réseau de cette nature soit d'origine sinon arabe, du moins "musulmane". Le téléfilm choisit l'option du maghrébin.
Ce maghrébin va-t-il être un élément d'élite des R.G., du GIPN ? Non, voyons, ça ne peut être qu'un taulard.
Va-t-il s'appeler Mouloud, Saïd ? Hé non, il s'appelle Leon !
Le méchant, lui, aura bien le prénom maghrébin.
Alors la belle idée du téléfilm va être de montrer que l'un s'échappe d'une prison, et que l'autre s'y enferme. A la cellule de Léon correspond pour Bilal la métaphore de l'oiseau enfermé dans la cage.
Tandis que l'un s'émancipe et trouve une rédemption, l'autre s'enferme dans son aveuglement cauchemardesque.
Si cette approche est plutôt intéressante, elle ne compense quand même pas un certain problème. La seconde couche nous est affligée avec le président-général du Pakistan. Il vomit les méthodes de ses services d'espionnage (côté gentil) mais il est un poil caricatural quand il rencontre le ministre français.
Le ministre français: "nous dirons à l'O.N.U. que le problème du Cachemire doit être abordée de façon originale."
Le président pakistanais: "Original ? C'est bien , ça, original...", avec une tronche grotesque d'analphabète complet.
C'est bien parce que le Pakistan est un pays particulièrement trouble que le traitement du président aurait mérité un peu plus de finesse.
Au moins le racisme latent de la fiction française disparaît-t-il en donnant le rôle principal à Maher Kamoun. Mais la dramaturgie ne s'amuse pas à prendre trop de risque non plus.
C'est finalement l'interpétation excellentissime de Maher Kamoun, en type qu'on envoie dans une opération à laquelle il n'est pas préparée qui donne tout son souffle au personnage, qu'il libère du carcan (c'est le cas de le dire) scénaristique.
Voilà un problème dont le F.L.T. devrait se saisir...
Fin du bémol.
Pour les autres acteurs, on peut aussi les féliciter: Anne Brochet est parfaite, et Asil Rais hallucinant, parce qu'il ne joue pas comme un halluciné.
Voilà quelque chose qu'on peut créditer à l'intelligence du scénario: le sang-froid inhumain du gars, son sens aigüe de la stratégie, sa précision dans son objectif, tout cela concourt à un réalisme qui met le spectateur à la limite de l'ambiguité par rapport à lui (la pourriture dans tout ce qu'elle a d'impressionnant): c'était risqué, mais là-aussi le jeu de l'acteur y contribue beaucoup.
[quote]en attendant la réalisation nous a servit de purs plans absolument MAGNIFIQUES : celui de Bilal blessé fumant sur son lit est par exemple d'une beauté implacable !!! [/quote]
Entièrement d'accord.
Rajoutons le plan de Léon et Bilal discutant au-dessus des mots gravés dans la pierre "Denfert-"Saint": un axe de prise de vue découpant la réalité pour en tirer une substance particulièrement belle. L'as-tu remarqué ? Ca n'était pas trop appuyé, intelligent et parfait.
Et puis le sommet dans l'art du montage alterné pour ce téléfilm quand tout le monde attends Bilal à une station de métro:
-On voit les terroristes, Léon et les forces de sécurité attendre Bilal pour l'arrêter à la sortie du métro.
-On voit bilal dans le métro.
-On les voit s'impatienter, avec de petits suspenses à l'intérieur de ce segment.
-On voit Bilal sortir du métro enfin et grimper l'escalier, avec un contre-plongée montrant toute sa difficulté, ce calvaire du mal.
-On voit les forces de sécurités commencer à entrer en action, mais à leur grande stupéfaction, Bilal n'est pas là.
-On voit Bilal arriver à son vrai objectif: le stade. Stupéfaction et angoisse. :shock:
[u]Là[/u], je dis bravo !
[quote]Ralala je rêve vraiment d'une vraie série DP avec Anne Brochet, ce serait le pied.[/quote]
Ce serait effectivement très bien ! A condition de résoudre le problème que j'ai soulevé.
L'agent Squeulit pensait qu'il s'agissait en fait d'une pierre de forme triangulaire