
Si le season finale du revival est sous le feu de critiques vives et que certaines sont fondées, je pense en revanche que le revirement de Reyes n'a pas lieu d'en être la cible. C'est au contraire un tour de force basé sur l'iconique cher à Chris Carter et une véritable réussite selon moi.
Pour le comprendre, revenons tout d'abord sur l'homme à la cigarette. Ce dernier incarne toujours le diable pour Chris Carter en poursuivant l'objectif le plus contre nature qui soit : survivre à ses propres enfants. Et bien sur, plus il essaie, plus il échoue. Mais comme « on ne peut pas tuer le diable » (dixit Chris Carter), il revient toujours, amoindri par ses échecs. Le visage du mal prend ainsi dans cette nouvelle saison la même apparence repoussante que Jeffrey Spender.

Le diable incarné revêt le visage de son deuxième fils Jeffrey, qu'il a lui-même défiguré, pour confronter le premier. Si Mulder ploie le genou, d'une manière ou d'une autre, le CSM trouvera un sens légitime à tous ses actes.
Bien évidemment, le plus grand symbole du CSM, c'est la cigarette Morley, elle-même grande faiblesse de... Monica !
Lorsque CC introduit Monica Reyes dans This is not happening, la première chose qu'elle fait, c'est écraser une cigarette avant de dire :
« I know it's not really FBI, but I really try to quit ».
Cette addiction aux Morley version light est un miroir de son addiction à la fascination pour le mal. C'est une spécialiste des cultes sataniques et meurtres ritualistes, nourrie par un lien ténu entretenu par une sorte de sixième sens lui permettant d'en ressentir la présence. Elle est attirée et fascinée par le mal. Elle lutte contre lui tout autant qu'elle lui succombe.
Dans ce même épisode, la scène de la voiture ou elle tente de résister à l'appel du Morley pour finalement céder fait directement écho à sa servilité apparente pour le CSM dans cette nouvelle saison. Et c'est la clope au bec qu'elle aperçoit son premier ovni.


Ses faiblesses, mais aussi son esprit ouvert et une sexualité ambiguë font de la Reyes de la saison 8 un personnage très humain et réussi. Malheureusement, lorsque vient le moment de passer Annabeth Gish en starring lors de la saison 9, on imagine aisément certains dirigeants de la FOX craindre de mettre en avant une femme aussi singulière et le personnage va subir une standardisation dès NIHT qui va la transformer en héroïne quelconque, troublant les pistes.
Le mouton noir se voit subir un blanchiment forcé à grands coups de pinceaux sans finesse. Une coiffure classique, une addiction au tabac passée sous silence et une sexualité passe-partout. Reyes est dépossédée de ses atouts pour devenir banal.

Une scène ridicule visant à démonter instantanément la singularité de Reyes pour en faire un personnage politiquement correct.
Le personnage de Reyes était de toute évidence en avance sur son temps, mais CC n'en restera pas là. Et avec le nouveau monde de 2016, il se voit enfin offrir le moyen de redorer le blason de Reyes, justement en le... salissant. Dans My Struggle II, le personnage récupère ses fascinations et ses addictions, mais aussi sa dimension et son identité.

Une accolade lourde de sens qui exorcise le nettoyage au kärcher de NIHT. Un clin d’œil certain à l'ambivalence sentimentale de Reyes en saison 8 qui aurait stimulé et émulé les fanfics de la grande époque.
Un regard profond, accompagnant des paroles toutes sauf anodines « J'aurais aimé que beaucoup d'autres choses soient différentes aujourd'hui ». Il existe encore une motivation profonde qui a poussé Reyes a accepté le pacte avec le diable que nous ignorons. Un autre événement qui l'a affaibli, probablement en lien à Doggett, mais que la participation très incertaine de Robert Patrick aux saisons prochaines n'a pas encore permis à CC de poser pour le moment. Nul doute que la décision sera prise quand il sera sur et certain de ne plus jamais pouvoir réutiliser le personnage.
Car Reyes se met certes au service du mal, mais s’enrichit de l'occasion pour apprendre comment il fonctionne, quels sont ses secrets, et une partie d'elle-même compte bien profiter de la situation pour combattre le futur, ce qu'elle fait en allant trouver Scully. Cette même Scully qui dira ensuite à Einstein qu'elle tient la solution d'une amie, explicitant qu'elle a compris sa lutte intérieure et ses intentions.
Le personnage de Reyes vit enfin et s'impose avec un pied de nez tout autant recevable que salvateur. Enrichi par l'expérience acquise par l'actrice ces 10 dernières années, ses scènes sonnent juste et, si elles déconcerteront les amateurs de concret, ne s'ouvrent jamais à la facilité.
Un personnage purement x-filien.