Lazare/Lazarus
Mémoires
Tout, dans cet épisode, est un retour vers ailleurs... le futur, la mort, la vie... l’amour, la mémoire...
Le titre de cet épisode, en VO ou en VF, fait bien-sûr référence à St Lazare*, ressuscité par Jésus Christ, selon l’Evangile de St Jean. Il nous indique donc un peu le thème de l’épisode, à savoir, la résurrection ; mais ici, c’est un autre type de résurrection, puisque le corps et l’âme ne sont pas ceux de la même personne.
Le pré-générique nous donne lui-aussi un indice de ce qui va se passer lors de l’épisode, mais aussi de la double interprétation que l’on pourra conférer à l’affaire, et d’ailleurs que l’on devrait normalement pouvoir donner à toutes les affaires non-classées de la série, puisque c’était le but initial : la confrontation entre deux opinions. Je cesse de m’éloigner et explique : Dans la banque, Jack Willis dit à Scully, en parlant des deux gangsters : “I’m inside their heads.
Scully : - Just as long as your keep yours.” (en gros, W. : «Je suis dans leur tête.
S. : - Du moment que tu ne perds pas la tienne.») Ce petit dialogue en dit long sur la suite de l’épisode ; et c’est à double sens : Willis deviendra-t-il fou ou bien perdra-t-il réellement ses esprits... dans l’au-delà. Et Willis qui dit être dans leur tête, alors que c’est Dupre qui va entrer dans la sienne... Plus tard, on entendra un enregistrement de Willis qu’écoute Mulder, où le premier dit “...a love affair I almost envy” («une histoire d’amour que j’envie presque»)... il parle des deux gangsters Warren Dupre et Lula Philips, il les connaît par cœur, il les envie, il est seul (pas de famille, on l’apprend à la fin) et passe sa vie à les traquer. On pourra donc se demander qui, de Scully ou de Mulder a raison : Willis a-t-il un choc post-traumatique, ou bien a-t-il l’âme de Dupre ?
L’épisode est plein de références, de renvois à plus tard, dans l’épisode, certes, mais aussi à d’autres épisodes. Je pense que certains éléments ont dû faire leur chemin dans l’esprit des scénaristes, etc. pour ensuite trouver une nouvelle incarnation, comme le veut l’épisode lui-même. Par exemple, lorsque Willis-Dupre arrive à son appartement, il semble étonné d’entendre les avions. Est-ce parce qu’il est un peu Willis ? Ou bien est-ce pour que, plus tard dans l’épisode, le téléspectateur se souvienne qu’il a déjà entendu les avions, lorsque Mulder fait étudier l’appel de Lula ? L’enlèvement de Scully et sa mini-hallucination sonnent comme un pré-«Fétichiste»/« Irresistible ». Le couple de gangster dont l’un des deux parle de bonheur tous les jours... ça ne fait pas un peu «Lundi»/«Monday», par exemple ?! Le tatouage aussi nous rappelle quelque chose (quand on a vu le reste de la série bien-sûr !). Les mémoires se mélanges, la mémoire de l’âme, celle du corps, la mémoire des événement, etc. Willis-Dupre se fait avoir doublement pas un Mulder très malin : le test de la carte d’anniversaire. Dupre signe alors que ce n’est pas l’anniversaire de Scully (même date que le sien), et de plus, il signe de la main gauche (Willis étant droitier). Le corps de Willis est diabétique, il a gardé ceci dans ses cellules, dans ses gênes. Mais c’est la mémoire de Dupre qui a pris la plus grande place dans l’esprit de Willis, même si celui-ci est toujours un peu là, grâce à sa mémoire et à son corps... ce qui me fait poser la question suivante : co-existe t-il en nous 2 sortes de mémoire (voire plus) : une mémoire organique liée à la connexion de nos neurones, à leurs stimulations visuelles, auditives, gustatives, tactiles et olfactives, voire plus ; et une mémoire de l’âme, une mémoire spirituelle d un être individuel, sans tenir compte, pour l’instant de potentielles vies antérieures ?
Admettons qu’elles co-existent effectivement en nous.
Notre mémoire organique s’étudie grâce à la science, comme on étudie le cerveau, les réactions de notre système immunitaire, etc. Nous la situons dans le cerveau, mais elle n’est possible que par la fonction et la stimulation de nos sens, donc par l’existence de notre système nerveux. Je ne vais donc pas décrire et expliquer ici son fonctionnement. L’utilité de cette mémoire est de nous prévenir de réitérer nos erreurs : à l’échelle mondiale ; c’est pour cela qu’il est indispensable de connaître notre Histoire ; et à l’échelle individuelle, évidemment : notre vécu, nos échecs, nos succès, notre expérience, nos calculs, etc. sont autant de leçons de vie que la mémoire stocke et que nous devons réutiliser afin d’avancer plus positivement. Voici, en gros, à quoi sert notre mémoire (en plus de son aspect pratique et de survie au quotidien : numéros de téléphone, visages et noms, jeux, langage, etc.).
Aussi, puisque nous avons admis qu’il existait en même temps, ou à côté, bref, simultanément, une autre mémoire, une mémoire spirituelle, comment fonctionne-t-elle et à quoi sert-elle ? Tout d’abord, posons-nous la question de sa formation : par quel moyen s’impriment en l’âme des souvenirs de notre vie : impulsions électriques, empreinte divine ? Pour répondre réellement, il faudrait être capable de définir l’âme : ce qu’elle est, sa « matière », cette force, cette essence : de quoi est-elle constituée ?
Quoi qu’il en soit, nous avons admis qu’elle existait, tout comme une idée peut exister. Mais une idée, après tout, est comme un souvenir : des parcours électriques dans les cerveaux. Si aucun cerveau n’y pense ou n y a encore réfléchi, une idée n’existe pas, pas encore du moins. Alors une âme serait comme une idée ; et comme un être vivant qui, avant d’être (pro-)crée, n’existait pas : il n’était que 2 gamètes séparés. Tout comme la matière qui, avant d’apparaître pendant le Big-bang, n’existait pas, ou peut-être pas.
Bref, admettons donc que l’âme garde des souvenirs ; alors peut-être que ces souvenirs constituent l’âme (ou une partie de l’âme) elle-même. Une âme serait faite de briques-souvenirs, de briques sentiments et de briques-volition : les dernières insufflent au corps le besoin, la nécessite ou l’envie de s’animer, d’agir, les secondes lui servent à pouvoir s’émouvoir, et les premières... ces briques-souvenirs sont plus difficiles à expliquer, puisque notre corps a déjà organiquement cette fonction. Serait-ce alors un simple calque, une couche similaire de souvenirs mais non plus sur un plan organique mais bien un plan spirituel, plus un plan horizontal mais vertical ? Certes, puisqu’elles semblent co-habiter en nous. Mais la fonction de cette mémoire spirituelle sert certainement au-delà de notre échelle individuelle. A la manière de notre mémoire organique qui nous sert non seulement au quotidien et pour notre avenir personnel, et qui sert aussi, nous l’avons vu, à l’échelle de l’humanité, la mémoire spirituelle aurait un rôle plus important à jouer à l’échelle universelle. En effet, s’il est vrai que les âmes voyagent dans l’espace et le temps, et même qu’elles habitent plusieurs vies (réincarnation), elles doivent véhiculer quelque chose de positif : un enseignement, une inspiration, une élévation. Que l’on croie ou non en la réincarnation, on peut envisager la survivance des âmes (sinon, notre question initiale n aurait pas lieu d être). Et selon plusieurs croyances et plusieurs appelons-les «penseurs», cette survivance de l’âme a un but ultime : soit le savoir universel, soit l’harmonie, etc. ; en fait le Tout et l’Unicité : l’Unicité Absolue (termes empruntés à Poe dans «Eureka».). La réunion de tout : le point absolu, le Tout-Puissant, là où se retrouvent toute la Matière et tout le Spirituel. La Fin.
Les âmes garderaient donc en elles tout ce qui a été vu, entendu, senti, touché, et même ressenti, voulu et réfléchi par tous, dans ce but ultime de réunion. Ensuite, tout sera possible, comme un nouveau Big-bang où tout aura un peu évolué mais où tout devra être recommencé.
Pour en revenir à l’épisode même, cette histoire de co-habitation de deux personnes (de leur mémoire) dans un même corps est relatée par le Dr Varnes, lorsqu’il raconte ce qui est arrivé à un homme seul survivant d’un accident qui a ensuite tué sa femme car il avait en lui la mémoire de l’amant de celle-ci... bref, ça me fait penser aux «Thanatonautes» et à «L’Empire des Anges» de Werber !
Bon, Mulder accumule les preuves, il emmène Scully vers ce docteur, il lui fourni 12 millions de preuves, mais celle-ci, comme à son habitude ne croit pas, égale à elle-même, elle avance ses explications scientifiques. Et elle n’a peut-être pas tort, après tout, rien ne nous prouve que Willis (qui connaissait les bandits sur le bout des doigts) ne soit pas tombé fou après sa mort de 13 minutes, qu’il n’ait pas eu un choc psychologique, voyant son affaire partir en fumée, lui qui passait le plus clair de son temps dessus. D’ailleurs, même devant Willis-très-Dupre, Scully tente de le ramener à lui-même en lui rappelant des souvenirs. Alors, cette mémoire, est-ce celle inscrite dans ses connexions synaptiques, dans son cerveau ou bien est-elle celle de l’âme de Dupre ; est-ce que Willis s’est lui-même plongé dans la psyché de Dupre, délirant après son coma et en pleine crise de diabète ? Le saura-t-on vraiment ? C’est là toute la subtilité de The X-Files, entre raison et paranormal, qui a raison ? Mulder et ses théorie aux frontières du réel ou bien Scully en plein rationnel ? A la fin de l’épisode, Mulder annonce la version officielle des faits... C’est une vérité montée de toutes pièces, comme souvent au FBI dans la série, mais cette fois-ci, c’est peut-être pour le bien, pour garder au mieux la réputation d’un homme victime de son job : tué par un gangster ou bien par un excès de travail ?
L’épisode suivant a beaucoup de similitudes avec celui-ci ; c’est aussi une histoire... d’outre-tombe.
* Spoiler Alias :
On retrouve d’ailleurs ce nom ou à peu près, dans une autre série, Alias, où un certain Lazarey réapparaît alors qu’il avait apparemment été tué.
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NostraMADus--


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