Bon, voilà, je m’y mets... J’espère ne pas trop répéter ce que vous en avez déjà dit, je voudrais écrire avant de lire, parce que sinon, je vais avoir envie de répondre un peu à tous je pense, et je vais avancer n’importe comment (comme d’hab). Tout d’abord, je voudrais parler généralement des 4 films de M. Night Shyalaman (résolument hitchcockien le coquin !) et de ses thèmes de prédilection... non, de sa source d’inspiration principale. Ensuite, je pense retomber miaou sur mes pattes en arrivant dans [i]Le Village[/i]. Alors, bon, bien sûr, ça va être un peu [b]spoiler[/b], et pour un film de Shyalaman, c’est dommage d’être spoilerisé... Et bien sûr, il en va de même pour ses trois premiers films ! So, be careful!
Que ce soit dans [i]Sixth Sense[/i], [i]Unbreakable[/i] (c’est bien ça le titre VO, hein ?) et [i]Signs[/i], on s’aperçoit qu’en fait MNS utilise un procédé assez similaire—se basant très certainement sur sa connaissance des films d’Hitchcock et des histoires que ce dernier a choisies de mettre sur grand écran—qui est d’utiliser un élément de l’étrange, du paranormal, et de le tourner et de le retourner de telle sorte que d’une part le spectateur oublie ou omette certains détails, qu’il baisse sa garde en somme, que sa notion de réalité disparaisse petit à petit, au fur et à mesure que le film avance ; pour ma part, j’essaie un maximum d’aller voir ses films sans essayer de chercher à savoir (bon, je n’y arrive pas... mais j’essaie Et puis pour [i]Sixth Sense[/i], je n’avais aucune idée de ce que c’était ni de qui était ce réal’ rien... Mon préféré des 3 cités fut ensuite [i]Signs[/i] aaah, ce film, c’est toute ma vie !). Bref, donc, il retourne les éléments de ses histoire pour nous surprendre. Ça, c’est pour le côté : « Je veux semer mon spectateur pour qu’il n’ait plus de repères.» Tout est lié dans ses films, à l’image de [i]Signs[/i] : tous les éléments ont une signification très forte et une incidence sur quelque chose qu’on apprendra plus tard... ce qui fait de ses films des films à revoir, avec un autre regard. Comme dans un Rubik’s Cube, MNS retourne aussi ces éléments, ou cet élément, du fantastique (fantômes & visions dans [i]Sixth Sense[/i], super-héros dans [i]Unbreakable[/i] et extraterrestres et religion dans [i]Signs[/i], légendes & monstres dans [i]The Village[/i]) d’une manière non plus seulement horizontale comme je l’ai expliqué tout à l’heure, mais d’une manière verticale aussi, en créant un décalage dans la signification, et ainsi, en apportant une morale, ou plutôt un questionnement de façon détournée, à l’image des mythologies, livres sacrés ou autre fables métaphoriques. Suis-je claire là ? Non, j’ai un peu de mal à m’en dépatouiller de ce que j’ai dans la tête... c’est aussi une des raisons pour lesquelles j’admire le travaille de MNS : c’est d’une précision, d’un amour du détail, et d’une telle maîtrise, que je m’imagine son cerveau hyper organisé, avec des tiroirs annotés partout, et une mémoire considérable. Mais là n’est pas réellement la question qui nous préoccupe... Quoi que...
Par exemple, dans [i]Sixth Sense[/i] d’un côté tout est fait pour qu’on ne s’aperçoive pas que le personnage joué par Willis est un fantôme... mais en fait, c’est trop logique pour qu’on y pense ! Et d’un autre côté, c’est toute une réflexion sur l’amour de la vie, la dénégation de la mort, et sur la mort elle-même, ce qui là n’est plus du tout un élément paranormal : c’est un élément humain, philosophique, psychologique, que sais-je encore... ce la fait partie des questions fondamentales de l’humanité, et est le lot de toutes les mythologies, les légendes, et Shyalaman est un chaînon qui relie notre for intérieur, les mythes qu’il a créé, et les nouveaux mythes issus de ces anciennes mythologies et symboles anciens, déjà issus de nous, etc. (je peux tourner comme ça longtemps !). De même, dans [i]Unbreakable[/i], MNS utilise une mythologie ancienne, les héros, les demi-dieux , devenue relativement récente, par besoin des Américains nouveaux venus sur leurs terres [u]volées, pillées[/u] aux Indiens (si, si, j’y tiens !) de se créer des mythes : les super-héros. Si on regarde très loin en arrière, la création de tels mythe est de raison quasi-religieuse, comme l’Homme s’est inventé des Dieux, il s’est inventé des héros, peut-être pour essayer de se comparer à des dieux (mais bon, je ne vais pas analyser cela, sinon, j’ai pas fini, je vais vous parler de Prométhée, d’Adam et Eve et de la Tour de Babel... et la, on en a pour un moment !). Un super-héros... ou plutôt, et c’est là tout le génie de Shyalaman : la genèse d’un super-héros ! Il a fait un film de cette partie très peu mise en valeur de toute la genèse d’un super-héros, la découverte de ses pouvoirs, etc. Et ça même, on ne s’en aperçoit qu’à la fin du film... à la découverte de qui est l’ennemi, l’anti-héros... Qu’est-ce que c’est d’autre que : la découverte de la Vérité par la réunion (par réunion, j’entends bien sûr la complémentarité, le face à face, la prise de conscience,...) du Bien et du Mal. Signifiant et signifié sont extrêmement imbriqués chez Shyalaman (au fait, vous avez vu ?! Maintenant je sais l’écrire correctement son nom !). Je passe à
[i]Signs[/i] tout de suite parce que le sujet c’est quand même [i]The Village[/i], et il faut bien que j’abrège. [i]Signs[/i] : on part doucement sur un côté religion (je ne m’y connais que très peu dans ce domaine, en fait, comme le réalisateur (j’imagine) ce qui m’y intéresse, c’est tout le côté symbolique et réflexif de la psychologie humaine), puis très vite on comprends, ou crois comprendre que le film, vu l’affiche et le titre déjà, parle d’extraterrestes et de leur crop-circles, des signes dessinés dans le champ de maïs. Ce à quoi on s’attendrait, c’est quasiment de la SF. MAIS ce serait sans compter sur le génie (oui, j’y tiens aussi.) de Shyalaman, qui nous a balancé cette histoire d’ET, comme un illusionniste nous éblouirait avec une flamme aveuglante, pour mieux nous préparer le réel tour de magie... la magie des signes, celle du destin, du TOUT EST LIÉ—et, croyez-moi ou pas, après avoir vu ce film, ma vie a changé dans le sens où, au fond de moi, vibrait déjà cette sensation, ce sentiment qu’il faut savoir lire, décrypter les signes qu’on nous envoie, et que le film a réveillé cette petite vibration et l’a transformée en way of life, en manière de vivre... au quotidien—car, oui, les signes, ce ne sont pas ces (j’allais dire vulgaires...) signes extra-terrestres, ces crop-circles aliens (artistes dans l’âme apparemment) mais bel et bien les signes de la vie, les coïncidence, le destin. Et Shyalaman, choisit les ET pour la simple raison de nous faire oublier, ou de nous écarter de son réel objectif, pour créer la surprise ou la révélation ultime. Il aurait utilisé l’épidémie de grippe, c’était pareil, mais ça n’aurait pas eu le même impact... et puis la fausse route indiquée au spectateur avant même la sortie du film, c’est à dire : grâce au titre et à l’affiche, n’aurait pas pu se faire... Signes... quels signes ?
Bon, j’arrive donc enfin au film qui nous intéresse : [i]The Village[/i].
Nous avons, dans ce film, l’élément fantastique des monstres légendaires cachés dans la forêt qui entoure le village. Un pacte—tacite—entre eux et les habitants du village fait en sorte que la lisière ne doit jamais être dépassée, et qu’ainsi, les habitants n’ont rien a craindre des monstres hideux et dévoreurs de viande. On connait cela, même en France, ce genre de mythe. C’est une sorte de mythe universel. Aux USA, le monde de la nature, l’intérieur des forêts étaient considérés comme des endroits sauvages, repaires du Diable, des sorcières... du Mal. A une époque très puritaine... on a vu les massacres de Salem, etc. C’est un sujet qui fait partie de l’histoire américaine, je serais tentée de dire néo-américaine (sans référence à [i]Matrix[/i]), car, ils avaient aussi la peur des Sauvages, les Indiens, ces Indiens qu’ils considéraient comme non civilisés, car croyant à plusieurs Dieux, des Dieux de la nature, des animistes... des Indiens qui se "déguisaient" avec des peaux d’animaux (pour communier avec la nature, pour s’approprier la force, la ruse, etc.), c’étaient comme des monstres pour ces messieurs-dames bien-pensants et bien habillés. Et voilà que MNS utilise quelque chose de très proche : un mythe, une légendes sur des habitant monstrueux vivant dans la forêt, des sauvages, les maudits sauvages. C’est quelque chose que nous avons même ici, en France, dans notre inconscient collectif, et qui, chez les Américains, a pris aussi une ampleur énorme à Salem par exemple (voir le passage de l’histoire que l’on appelle Inquisition !) OK, c’est cette base qu’à choisi le réalisateur mais alors, que va-t-il nous dire à travers cela, car c’est tout de même son habitude de nous faire tourner en bourrique avant le bouquet final ?! Eh bien, avant d’en arriver à ce point, je vais vous dire dans quelles conditions suis-je allée le voir : avec le moins d’info possible. Je n’avais vu qu’une ou deux bande-annonces, j’avais évité tout documentaire, je n’avais pas lu vos commentaires, reviews, etc. (pas encore d’ailleurs, mais dès que j’aurai posté ceci, je m’y mets !) et j’étais bien décidée à ne pas chercher à savoir ou à comprendre à l’avance... Malheureusement, je ne contrôle pas toujours mon cerveau décidément bien désobéissant, il bosse tout seul souvent ! Et voilà que dès le début du film, mon cerveau enquête et grappille des info comme l’absence de dates sur la tombe du jeune... Smith (?), mais d’un autre côté, pas d’avion durant tout le film... Mais des allusions à la ville (ce qui indique tout de même que les Anciens ont connu la ville... ils ne sont donc pas dans ce village depuis des siècles, ils ont créé eux-même cette communauté) ; ils ont peur de la forêt, de la nature, et ils ont peur de la ville... Ils ont peur de tout ma parole ? Hmm, pas vraiment, car vers la fin, lorsque l’instituteur parle avec sa femme du fait de retourner en ville, qu’est-ce qui angoisse madame ? C’est bien le retour à la ville, et non la traversée des bois. Mais tout cela est tellement bien ficelé qu’on est susceptible de laisser de côté tous ces détails pour suivre le chemin que MNS veut que nous prenions. Ensuite, on apprend la vérité sur les monstres... Puis, on s’aperçoit que peut-être, ils existent vraiment, ah, mais il veut nous rendre fous ?!!! Non, puisqu’on apprend que c’est le fou justement, qui, hors de tout contrôle des anciens--pris à leur propre jeu, propre piège (surtout ses parents... au jeune... je ne sais plus son prénom) en quelque sorte—a endossé le costume rouge, couleur interdite, couleur du sang, du sang de leurs amis, de leur famille qui a coulé, là-bas, dans la ville, couleur qu’il aime apparemment, et qui va jouer à effrayer la jeune fille aveugle au prénom si ambigu : Ivy (lierre en anglais)... Lierre, plante-parasite, plante grimpante, qui s’accroche aux arbres vers la lumière et absorbe leur sève, leur sang... Et pourtant, elle est douce et courageuse, mais comme le lierre, elle survit dans les bois, elle s’adapte, et malgré sa cécité, elle vainc son ennemi... qui n’est pas réellement son ennemi. Bref, ce n’est pas vraiment là où je voulait en venir.
On s’aperçoit donc—ou bien on avait deviné—que de l’autre côté des bois était la ville certes, mais la ville de nos jours. Bon, et, c’est tout ? NON, ça n’est pas tout ! D’une part, on obtient des explication sur le pourquoi pas d’avion, et grâce aux explications faites à Ivy par son père, on peut comprendre que c’est le grand-père ou sa fortune qui permet cela (enfin, j’ai compris ça comme ça...), on voit qu’en fait la ville n’est pas qu’un repaire d’autres monstres humains («Je ne m’attendais pas à ça ; il y a tant de douceur dans votre voix.» dit Ivy au garde forestier). Alors, ou est le Bien ou est le Mal ?... Comme dans [i]Unbreakable[/i], il est question de Bien et de Mal. On découvre la Vérité, en découvrant même que le Mal n’est pas forcément là où on le croit, que ceux qui pensaient faire le bien sont en fait responsables de la mort d’un jeune garçon (début du film), que leur entêtement et leur mensonge aurait pu coûter la vie à d’autres ; que le remède vient bel et bien du monde extérieur ; que le mensonge échappe toujours un jour à ses initiateurs et se retourne contre eux ; ce film nous montre aussi que la Vérité éclate un jour ou l’autre, et souvent par le biais de l’Amour ; il nous dit que les Hommes ne peuvent vivre en totale autarcie à jamais, que s’ils sont tous sur cette même Terre, c’est bien pour une raison ! On voit à quel point à vouloir être trop manichéen, et à écarter à tout prix le Mal, on recrée une nouvelle sorte de Mal, comme s’il naissait du Bien, tel un pôle négatif dans un aimant coupé en deux. L’un ne va pas sans l’autre. L’utopie n’existe pas. Pourtant, les habitants du Village continueront à vivre ainsi. Mais désormais, je pense, ils garderont au moins un contact... médicinal, avec l’extérieur.
Pour ce qui est du cast, je ne suis pas capable d’en dire beaucoup, sauf que je le trouve parfait. Les «grandes stars» dans les films de Shyalaman ne semblent pas avoir le même statut que dans d’autres films, ils se fondent mieux, je trouve, dans ses films. C'est le cas donc pour Sigourney Weaver. Enfin, c’est une impression toute personnelle. Peut-être est-ce dû à l’esthétique, la photographie, et bien sûr à l’écriture des personnages, à la direction des acteurs... Je ne sais pas trop définir cela, je n’ai pas le vocabulaire, ni les connaissances cinématographiques pour.
En tout cas, moi qui aime les arbres, leur graphisme, j’ai été servie dès les premières images du film. La lumière quant à elle était très juste, les jeux d’ombres et de lumière sur les visages très réussis, les apparitions de la bête, les flous, les bruits étranges, excellents.
J’ai parfois ressenti au fond de moi comme un écho, comme si j’avais déjà vu telle ou telle scène, notamment lorsqu’Ivy est confrontée au «monstre» dans les bois. Je me suis aperçue que ça me venait (et là, j’en reviens aux Indiens) à une petite série de mon enfance, sur les légendes indiennes (dans Récré A 2 je crois) : ce déguisement, la forêt,... je ne sais plus exactement...) et puis l’histoire des anciens qui annihilent la Vérité sur le monde extérieur, ça m’a rappelé un épisode d’Ulysse 31 (aussi bien sûr tiré de la mythologie grecque), lorsqu’ils se retrouvent chez les Lotophages... en mangeant des fleurs de lotus, les habitant voient leur volonté s’annihiler... bref, voilà, je ne sais pas pourquoi... vous savez, mon cerveau n’est pas aussi bien rangé que celui de Shyalaman...
Mad range !
[b]Mad : [url=http://www.eapoe.org/works/tales/mystfb.htm]R. von Jung[/b][/url]
[img]http://img125.imageshack.us/img125/3218/terrybanis5.jpg[/img]